Maïs : une campagne 2024 positive, mais des menaces pèsent sur la filière
Le 28 novembre, l’Association générale des producteurs de maïs, AGPM, tenait sa conférence de presse de fin de campagne. Les surfaces ont augmenté et les rendements ont été bons, mais la filière demande des garanties de production, et une protection face à la concurrence internationale.
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« Alors que la France a perdu 500 000 ha de maïs, et l’Europe un million, sur les dix dernières années, nous enregistrons en 2024 une hausse de 12 % des surfaces », indique Franck Laborde, président de l’Association générale des producteurs de maïs, en introduction de la conférence de presse que l’AGPM tenait le 28 novembre. Une hausse multifactorielle, explique le cultivateur des Pyrénées-Atlantiques, due à la fois aux mauvaises conditions d’implantation des céréales à paille à l’automne, mais aussi à une bonne année pour le maïs en 2023, avec des marges restaurées.
Les surfaces de maïs grain sont consolidées à 1,39 million d'hectares, et à 1,28 million pour le maïs fourrage, également en hausse, mais les superficies baissent de 16 % pour le maïs doux et de 24 % pour les semences de maïs, respectivement à 21 760 ha et 61 164 ha. « Ces baisses sont dues aux stocks encore conséquents, résultant de la bonne campagne 2023 », pointe Aude Carrera, animatrice de la filière maïs grain d'Arvalis.
Une campagne compliquée en raison des intempéries
L’implantation du maïs s’est faite dans des conditions difficiles, en raison des précipitations. « 20 % des semis ont été réalisés après le 20 mai, et 10 % en juin, ce qui est très tardif, explique Aude Carrera. Nous étions inquiets quant à leur capacité à terminer le cycle. Par ailleurs, les conditions de température étaient peu poussantes, et la forte pression des ravageurs a réduit les densités. » Les maïs ont fait face à des problèmes sanitaires, notamment sur la façade ouest, avec une forte présence de l’helminthosporiose et de l’heliothis.
La fin de cycle, pluvieuse également, a encore rallongé le cycle, qui affiche un retard de trois semaines. Au 18 novembre, un peu plus de 80 % des récoltes de maïs étaient effectuées, mais de fortes hétérogénéités demeurent sur le territoire, la Bretagne n’en étant qu’à 50 %. « La France est coupée en deux, mais cette année, ce n’est pas entre le nord et le sud, mais entre l’est et l’ouest », déclare Aude Carrera.
La production nationale en hausse
Malgré ces difficultés, la production totale est en hausse, à 13,8 Mt, contre 12,6 Mt l’année dernière. Les rendements en maïs sont satisfaisants, la moyenne nationale atteignant 99,5 q, en légère baisse par rapport à 2013 (102,5 q). Le rendement maïs fourrage atteint 12,3 t/ha contre 12,6 t/ha l’année dernière.
Mais l’état sanitaire des récoltes de maïs préoccupe la filière, le taux d’humidité pouvant monter jusqu’à 38 % pour certains maïs, nécessitant un séchage important par les OS, avec un risque de surchauffe, voire d’incendies, comme cela a été le cas ces derniers jours, dans les Deux-Sèvres, l’Oise ou encore dans la Sarthe. « Les maïs récoltés le plus tardivement présenteront des mycotoxines, prévient Franck Laborde. Il s’agira alors pour les collecteurs de faire un travail de nettoyage et d’allotement pour rendre le grain conforme aux normes imposées par leurs marchés. »
Demande de simplification sur la construction d’ouvrages
Si l’AGPM espère que les résultats satisfaisants des deux dernières campagnes incitent les agriculteurs à implanter du maïs en 2025, la filière rencontre encore de nombreux freins, contre lesquels l’association entend lutter pour implanter, à terme, trois millions d’hectares en France. Le président du syndicat des maïsiculteurs a rappelé la volonté de la filière de pouvoir s’adresser à un guichet unique, en ce qui concerne l’entretien des fossés.
Autre cheval de bataille de l’AGPM, la simplification de la réalisation de réserves d’eau. « Nous souhaitons l’adoption de quatre ou cinq arrêtés permettant de simplifier le parcours du combattant que les agriculteurs ont à effectuer pour créer des réserves, estime Franck Laborde. Nous demandons notamment que dans les dossiers préalables à la création d’ouvrage, soit intégrée une étude socio-économique, en complément des études environnementales. » Si certains points peuvent faire l'objet de seuls arrêtés ou décrets, l’AGPM compte également sur le projet de loi de finances, le projet de loi de financement de la sécurité sociale, la Loi d’orientation agricole et le projet de loi Duplomb/Menonville pour simplifier les démarches des agriculteurs.
Opposition au libre-échange et soutien aux manifestants
Le président de l’AGPM a rappelé l’opposition du syndicat au Mercosur, et plus généralement aux importations mettant en péril les filières françaises et européennes. « Nous avons conduit une étude qui met en lumière les différences de production entre le Brésil et l’Europe. 95 % des maïs produits au Brésil sont OGM. »
Autre sujet sensible, celui des semences de la mer Noire : l’Ukraine a obtenu en 2020 une équivalence lui permettant d’entrer sur les marchés européens pour commercialiser ses semences de maïs. « Il s’agissait à l’époque d’alimenter les marchés de l’est, et ponctuellement l’Europe de l’Ouest, en cas de manque d’une variété, explique Céline Duroc, directrice de l’AGPM. Aujourd’hui, les quantités importées en Europe ont été multipliées par 13, passant de 9184 q en 2021/2022 à 120 981 q en 2023/2024. » L’AGPM a sollicité le gouvernement pour lui demander d’agir afin de préserver la filière semencière française, leader européenne de la production de semences de maïs et première exportatrice mondiale de semences de maïs.
Enfin, soutenant les agriculteurs, qui depuis quelques semaines, ont recommencé à manifester pour exprimer leur mécontentement, Franck Laborde s’est montré solidaire de la FDSEA Seine-et-Marne et des Jeunes Agriculteurs Île-de-France Ouest, qui, jeudi matin, avaient érigé un mur devant les locaux de l’Inrae à Paris : « Les actions que nous menons doivent respecter les biens et les personnes et ne pas être de nature à gêner les Français outre mesure. Ce qui se passe ce matin respecte ces notions. Nous n’avons pas assez de solutions, l’Inrae doit travailler plus au service des agriculteurs. »
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